“Forest National est vide. De petits carrés, rouges et blancs, au sol, marquent les places individuelles. Au centre de la fosse, une chaise vide trône dans la lumière, encadrée de cordon VIP. Les quelques journalistes invités se dispersent à distance de sécurité. On s’installe. On attend. Puis les trois coups du théâtre, inattendus, frappent, et le rideau de la scène s’ouvre.
Une conférence de presse qui commence sur un mode performatif, comme un "dernier événement culturel", le cri feutré des travailleurs du spectacle. Un micro-spectacle mettant à l’honneur évidemment les artistes, mais également tous les travailleurs dits "de l’ombre". C’est l’iceberg tout entier que l’on montre. Car la culture, c’est 250.000 emplois en Belgique selon les chiffres d’une étude de 2014. Et derrière ces emplois, des foyers, des familles.
La performance continue avec différents signes du spectacle : ces briquets que l’on balance de droite à gauche par-dessus soi aux concerts, les applaudissements qui clôturent les spectacles. Puis les artistes s’en vont et laissent les journalistes dans le vide de cette grande salle avec un clown balayeur et une chaise, brillante d’absence, dans son carré sans VIP...
Derrière cette action, un manifeste, une pétition. A découvrir et rejoindre via le lien : www.the-last-event.org/
(https://www.msn.com/fr-ca/autos/video/action-de-your-culture-our-future-%C3%A0-forest-national/vp-BB1456lN)
"Your culture, our future ! " titre cet écrit. Votre culture, notre futur. Un titre qui rappelle qu’avant toute chose, les travailleurs culturels sont tournés vers leur public, mais qu’ils en dépendent, également. Au-delà du besoin de s’exprimer, il y a donc l’assurance que la culture est un bien partagé : sans public, la culture étouffe, et sans travailleurs, il n’y aura rapidement plus rien. Car c’est ce que tient à rappeler Pierre-Alain Breeveld, l’un des hommes à l’initiative du manifeste.
"Nous sommes en train de devenir des anonymes, de disparaître progressivement". Dans ses propos, aucune accusation, aucune agression. D’après lui, il y a avant tout une grande méconnaissance de la réalité culturelle. Il rappelle qu’il y a évidemment des mesures, "des mesures de survie à court terme", comme le chômage économique. Mais beaucoup d’intermittent, artiste ou techniciens, ne sont pas reconnus, ou pas assez installés dans le métier pour pouvoir bénéficier des aides - dont l’accès est encore souvent conditionné par un parcours du combattant administratif (ndla). Certains ont déjà du se tourner vers d’autres activités pour trouver des rentrées. "Et quand nous pourrons reprendre, nous aurons perdu une foule de gens qualifié qui auront dû trouver autre chose. Ce sont des compétences qui vont se perdre, des gens qui ont été formés, de vrais professionnels qui disparaissent."
Il insiste également sur la question de la temporalité de la culture : lorsque la reprise sera autorisée, il faudra du temps. Du temps pour répéter et se préparer à accueillir un public, mais aussi du temps pour remplacer, reformer des professionnels, trouver et tester de nouvelles formes en fonction des consignes sanitaires.
Alors, avec ce baroud d’honneur, avec cette pétition, ce manifeste, lui, et tous les signataires, demandent des mesures temporaires pensées pour un accompagnement sur-mesure du secteur culturel, tant pour les travailleurs que pour les entreprises. Ils demandent une aide qui prenne en compte une réalité trop souvent méconnue, avec des propositions concrètes sur lesquelles il n’y a plus qu’à se pencher.”
Yuri Didion
0472/951.800
yurididion.wordpress.com