Long Live The Life That Burns The Chest & Ether / After
Au commencement du projet, il y a un texte, L’Éveil du Printemps de Frank Wedekind, qu’Armel Roussel monte en 2018 et dont il désire poursuivre la recherche et interroger ses thématiques au niveau local et international. Il envisage alors une tétralogie dont Long live the life that burns the chest (Que vive la vie qui brûle la poitrine) est le deuxième volet.
Armel Roussel est parti aux quatre coins du monde réinterroger les thématiques de L’Éveil du printemps – désir, sexe, amour, homosexualité, religion, tabou, identité… – avec un jeune acteur estonien, Jarmo Reha.
De Tokyo à Kaolack, de Pondichéry à Tallinn, Armel et Jarmo ont travaillé avec des acteurs locaux et questionné la réception de L’Éveil. De retour de ces workshops, ils proposent un solo (création à Tallinn en septembre 2019) où le jeune acteur estonien, accompagné par les sublimes vidéos de Julien Stroïnovsky – témoins des voyages, des moments de partage et échos des autres cultures –, montre toute la force brute et vivante de son jeu et sa totale fantaisie.
L’Éveil du Printemps qui date de 1891 provoque toujours autant de remous. Comment les thématiques de cette pièce sont-elles perçues et vécues dans le monde ? La culture influence très fortement l’approche et la réception de l’œuvre, et peut provoquer bien des décalages. Entre documentaire et création théâtrale esthétiquement très dépouillée, le spectacle se veut réaliste et fantasmatique. Drôle, ludique, romantique, touchant et troublant à la fois, Long live the life that burns the chest interroge les thèmes de L’Éveil ici et ailleurs, parle d’Art, de sexe, de désir, d’amour mais surtout de construction d’identité. Sur scène, Jarmo Reha devient un écran sur lequel se voit projeter sa métamorphose due aux contacts des différentes cultures. Entre fiction et réalité, la représentation théâtrale joue sur différents degrés. Elle se construit devant le spectateur pour être sans arrêt interrogée et bousculée, et avancer petit à petit vers une fiction totale.
Les représentations de Long live the life that burns the chest seront suivies d’une étape de
travail du volet suivant de la tétralogie : Éther/After (qui sera créé au Théâtre Les Tanneurs en 2020-2021). Après avoir parcouru le monde, il est question ici d’interroger les thématiques
de L’Éveil auprès de la jeunesse bruxelloise. Armel Roussel enquêtera auprès de jeunes pour
connaître leurs rapports au désir, à la sexualité, à la mort, à l’autorité, aux rapports homme/
femme… Cette matière dramaturgique sera ensuite retravaillée sur le plateau avec des acteurs professionnels qui porteront cette parole intime de la jeunesse. Une petite mise en bouche de ce
qui sera une grande fête théâtrale, une célébration dansée et musicale !
Spectacle en Français
Distribution
Long Live The Life :
Un projet de Jarmo Reha, Armel Roussel
Devant la scène : Armel Roussel
Sur scène : Jarmo Reha
Création films : Julien Stroïnovsky
Création sonore et musicale : Liis Ring
Création lumière et coordination technique : Nicolas Marty
Chorégraphie : Mercedes Dassy
Ether :
Avec Tom Adjibi, Romain Cinter, Thomas Dubot, Amélie Géhin, distribution en cours.
Vendredi 8 novembre 2019,
par
Catherine Sokolowski
"Hug me"
Deuxième volet d’une tétralogie autour de l’Eveil du Printemps (Frank Wedekind, 1891), le 19ième spectacle de Armel Roussel est conduit par Jarmo Reha, Estonien de 28 ans, « jeune et mature, complexe et terriblement d’aujourd’hui ». Le spectacle est un voyage multiculturel, une rencontre avec la jeunesse du Japon, du Sénégal et d’Inde. Jarmo fait les présentations et lie les séquences. Les jeunes gens font part de leurs ambitions, de leur salaire, de leur situation amoureuse, de leurs conditions de vie et de bien d’autres choses encore. Tout cela avec bienveillance et humour. Une initiative instructive et chaleureuse.
Lorsqu’une opportunité s’est présentée, Armel a pensé à Jarmo : « j’ai une proposition bizarre à te faire ». Bien que Jarmo ait eu quelques doutes (« Es-tu dans ton état normal Armel ? »), il a accepté avec enthousiaste. Ils sont partis quelques jours ensemble, pour faire connaissance. C’était le début de cette belle collaboration.
A travers Jarmo, le voyage commence en Estonie. Sympathique, accessible, le comédien déclare qu’il a « 80% de désir d’être là et 20% de peur d’être là ». Tout au long du spectacle, au milieu d’éléments quantifiables s’invitent quelques estimations improbables. Tout en subtilité et avec beaucoup de naturel, le jeune homme s’exprime en anglais, ne ratant pas une occasion d’apporter une touche d’humour à ce spectacle de théâtre documentaire.
Après l’Estonie, le Japon. Comment saluer les Japonais ? La séquence d’accueil commence par une révérence et se termine en accolade. Les cultures se rencontrent, « tout est grave et léger ». Les différences existent et sont également physiques « Pour devenir japonais, raccourcis tes cheveux, porte des vêtements sombres…ne montre jamais tes sentiments ». Beaucoup d’enthousiasme dans les partages entre communautés. Au Sénégal, la parole est donnée à une actrice. Elle gagne 300 € alors que la moyenne nationale est de 103 €. Elle a la chance de travailler aussi à l’étranger. Le tour du monde se termine en Inde. Un jeune homme explique que le métier de son père est de construire des tombes. Là, en cas de vie vertueuse, on peut se réincarner, pourquoi pas en agneau ? Beaucoup de sujets sont abordés, naturellement, simplement, avec humanité. Signe de ralliement : un doigt tendu vers le ciel.
A l’heure de conclure, l’acteur questionne le public : qu’attend-il de lui ? Une morale, un bilan… ? Sa réponse : « Que vive la vie qui brûle ma poitrine ». S’ensuit un dialogue très drôle entre Jarmo et Armel, la présence de ce dernier étant simulée par la main de Jarmo devenue marionnette de ventriloque pour quelques instants. Sans être un « feel good show », le spectacle dégage des ondes positives, le câlin généralisé n’est pas très éloigné. Originale, instructive, humoristique, cette création mérite le détour. Voyage dépaysant au sein d’autres pays, rencontres enrichissantes avec d’autres cultures, et voilà « l’Eveil du Printemps » revisité. Le but est atteint.
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