Les enfants de Jehovah
Avec son énergie particulière, des lumières, des images et un son hypnotiques, servi par une distribution ardente, dans la douleur des loyautés contradictoires, il nous ouvre son univers de fantômes, de souvenirs et de secrets. Partagés entre tentation de rompre et espoirs de retrouvailles, en être ou pas, frère et sœur se déchirent …
Texte et mise en scène Fabrice Murgia/Artara
Interprétation : Cécile Maidon, Magali Pinglaut, Ariane Rousseau.
Production Cie. Artara
Coproduction Théâtre National/Bruxelles, le Théâtre Royal de Namur, Montpellier/le Printemps des Comédiens, la Cie des Petites Heures, le Parvis Scène Nationale Tarbes-Pyrénées, le Théâtre de Grasse, le Théâtre des Sablons/Neuilly-sur-Seine, le Théâtre Vidy-Lausanne, la Maison de la Culture de Tournai, le Carré Sainte-Maxime.
Prix des places : 19 € (adulte) - 15 € (+ 60 ans, groupe) - 10 € (- 26 ans, étudiant, enseignant, demandeur d’emploi, groupe senior)
Lundi 26 novembre 2012,
par
Catherine Sokolowski
Murgia contre Jéhovah
Précise, forte, poétique, dramatique, soignée, touchante, comment décrire au mieux une création de Fabrice Murgia ? « Les enfants de Jéhovah », dans la lignée du « Chagrin des ogres », est un spectacle très contemporain, mêlant vidéo, son, caméra et acteurs, de manière si subtile que le spectateur ne sait plus toujours où commencent les projections et où finit la scène. Il s’agit ici de dénoncer l’influence des Témoins de Jéhovah, de manière générale, mais aussi plus précisément sur les enfants, victimes de doctrines qu’ils n’ont pas choisies. Un message à caractère autobiographique dont la clarté tranche avec l’opacité relative des récits contés, l’approche personnelle et réussie d’un metteur en scène très doué.
Plusieurs histoires s’enchevêtrent et se rencontrent. Il y a cette femme dont le mari italien est venu travailler en Belgique « contre du charbon », et qui perd son premier enfant, il y a cette jeune fille qui souhaiterait tellement que son frère, excommunié, vienne assister à son mariage, il y a cette famille déchirée par un incendie, et surtout, il y a le spectre des Témoins de Jéhovah. Les jeux de lumière hypnotisent, les images poétiques et esthétiques transcendent, le drame est omniprésent.
Manipulateurs, les Témoins de Jéhovah arrivent à convaincre certaines familles fragilisées en profitant de leur détresse pour offrir de l’aide. Ils imposent alors leurs règles à des enfants qui n’ont rien demandé et qui ne fêteront plus jamais la Saint-Nicolas. Les adultes semblent ensuite profondément marqués par cette enfance particulière. Comme dans « Le chagrin des ogres », Fabrice Murgia met en évidence l’innocence des enfants, la fragilité des adolescents et l’influence de ces périodes sur la vie d’adulte.
Un spectacle court et dense, entre rêve et cauchemar, trois actrices talentueuses (Ariane Rousseau, Magali Pinglaut, Cécile Maidon) plusieurs thèmes évoqués : le déracinement, les drames familiaux, l’endoctrinement, la clairvoyance des enfants. Beaucoup d’excellentes raisons d’apprécier cette création peuvent être évoquées mais faut-il vraiment ajouter quelque chose au commentaire des adolescents qui occupaient ce soir-là la rangée supérieure : « Oh comment c’est bien fait !!! ».
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