La bibliographie de Calixthe Beyala compte à ce jour seize romans. Quatre d’entre eux ont été couronnés par des Prix littéraires et pas n’importe lesquels puisque y figure le grand prix de l’Académie française en 1996 pour "Les Honneurs perdus".
Dans cette rencontre avec Edmond Morrel, Calixthe Beyala évoque de quelle manière ses livres sont nourris de sa sensibilité particulière de femme, de militante en faveur des minorités, d’Africaine…mais aussi, ajoute-t-elle d’Européenne.
Elle a l’art, en quelques lignes, de tracer des paysages que l’on n’oublie plus, comme celui de cette ville du Nord, Fort-Mardyck…une ville qui existe vraiment, entre Dunkerque et Saint Malo, dans le Nord industriel.
Vous n’oublierez pas non plus la façon dont la narratrice, Pauline, une adolescente de la banlieue de Pantin raconte ses rencontres, sa vie dans ce quartier de Paris, leurs travers, leur difficulté de dire l’amour et, corollaire, la violence et la brutalité. Elle dessine des portraits émouvants d’une assistante sociale, Mme Jamot, de M Denisot ou Mlle Mathilde, des professeurs désenchantés, de Mme Boudois la concierge, « aussi consciencieuse que méchante », du médecin, le docteur Bensoussian et de sa femme…
Le livre tient une place essentielle dans ce roman, où l’auteur glisse, comme un aveu (P. 65) « ces écrivains se prennent pour Dieu. Ils recréent le mode et veulent nous faire croire qu’on peut y trouver notre place ». Et puis, il y a la place centrale de la mère, cette « colonne vertébrale » de la vie que Pauline redécouvre dans un livre que son institutrice lui fait lire et relire : « Le livre de ma mère » d’Albert Cohen.
En évoquant ce passage, Calixthe Beyala s’interrompt… « Vous voulez que je parle de cela, dans ma vie ? Dans la réalité de ma vie ? » Et elle raconte les enfants qu’elle recueille chez elle, et à qui elle lit« Le livre de ma mère »…
On comprend mieux alors comment et pourquoi Calixthe Beyala milite pour la cause des femmes, la Francophonie et les droits des Minorités Visibles à travers le Collectif Egalité dont elle est le porte parole.
Elle nous lit aussi, avec sa voix grave et belle, un passage de son livre, un monologue de révolte. Contre la mort.