Amour(s)

Ixelles | Théâtre | Le Boson

Dates
Du 27 février au 17 mars 2018
Horaires
Tableau des horaires
Le boson
Chaussée de Boondael, 361 1050 Ixelles
Contact
http://www.leboson.be
reservations@leboson.be
+32 471 32 86 87

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Amour(s)

C’est l’histoire d’un homme qui ne s’est pas conformé,
D’un homme jeune et authentique.
C’est l’histoire d’un homme qui aime les femmes libres, vraiment libres.

C’est l’histoire d’un homme abandonné par sa mère à 8 jours,
Et qui la retrouve après 20 ans d’absence.

C’est l’histoire de l’amour hors du commun de cet homme pour cette femme inconnue.
Et de sa rupture définitive.

Une histoire de liens donc,
Ceux qui relient et ceux qui entravent,
Ceux qui tissent un amour véritable,
Entremêlant attachement indestructible et liberté absolue.

Distribution

D’après les Lettres à ma mère de Paul Léautaud (Ed. Mercure de France)
Adaptation et mise en scène Bruno Emsens
Avec Florence Hebbelynck, Céline Peret et Nicolas Poels
Scénographie Vincent Bresmal / Chorégraphie Camille Raséra / Création lumières Gaëtan Van den Berg / Création sonore Thomas Raa / Costumes Elise Abraham, en collaboration avec le costumier Maghet / Coiffure Thierry Pommerell / Maquillage Marie Messian/ Régie Showup ! en alternance avec Martin Célis
Une production de la compagnie des bosons

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Vendredi 16 mars 2018, par Dominique-hélène Lemaire

Le jeu des acteurs

fait TOUT

Un an sépare le petit Marcel né en 1871 du petit Paul né 1872 ! Proust et Léautaud ? Un même amour absolu pour la mère, mais la comparaison s’arrête là ! Firmin Léautaud, son père (1834-1903), est issu d’une famille de paysans des Alpes-de-Haute-Provence et s’est installé très jeune à Paris suivant des cours de comédie pour entrer à la Comédie-Française et faire une carrière de souffleur. Firmin a été en ménage avec Fanny Forestier, la sœur aînée de Jeanne qui met au monde le petit Paul. Elle reprend son métier de chanteuse d’opéra tout de suite après la naissance de Paul et partira dans des tournées. L’enfant est mis en nourrice jusqu’à l’âge de 2 ans…Tout se joue avant deux ans ? Ensuite, une vieille bonne, Marie Pezé s’occupe de l’enfant pendant une dizaine d’années. Il a l’occasion d’entrevoir sa mère une petite dizaine de fois avant qu’elle n’aille s’installer à Genève, épousant en 1895 un médecin avec qui elle aura deux enfants. Elle ne retrouvera son fils que vingt ans plus tard, à l’occasion de la mort de sa sœur Fanny, à Calais, en 1901. S’ensuit une correspondance émouvante entre la mère et le fils (publiée par le Mercure de France en 1956, Lettres à ma mère) qui dure 6 mois, puis les lettres de Paul restent mystérieusement sans réponse, jusqu’à l’annonce de la mort de la mère. Histoire cruelle et vraie !

« Une mère absente est aussi dangereuse qu’une mère trop présente. Elle laisse dans le cœur de son petit un vide, que rien ne pourra combler. Elle lui ôte la mémoire, tu vois ? Il ne se souvient que d’elle ! »

Les lettres sont la matière de cette production théâtrale éblouissante de vérité de sentiments, de chassés croisés d’amour et de désamour, d’attentes insensées de reproches de pardons et de tendres consolations, le tout machiavéliquement ourlé des deux côtés d’intentions moins nobles, à ce qu’il semble. Serait-on devant de sordides intérêts, captations d’argent ou d’héritages ? Par le jeu d’ombres et de lumière, la dualité des sentiments s’installe, le poison infuse et le rêve de la pureté de sentiments s’estompe progressivement de part et d’autres, même si à chaque instant, on ne cesse de tomber sous le charme de l’un et de l’autre.
Brodé sur un savant travail sur la mémoire affective des protagonistes, s’installe progressivement le doute sur les intentions réelles de chacun. Est-on au cœur d’un roman réaliste comme dans Le père Goriot ?

Terriblement humain. Chaque lettre est un torrent verbal presque sans pause, un geyser d’affects admirablement interprétés par les deux comédiens dans une recherche perpétuelle de qualité de ton. Nicolas Poels et Florence Hebbelynck disent chaque lettre, comme une confession verbale où les mots prisonniers du temps déferleraient vers la liberté absolue. Le jeu silencieux des corps fait le reste. On ressent au plus profond, l’assaut désespéré de l’espace sentimental de la mère, jeune et coquette qui se refuse à ce fils exalté devenu homme qui se damnerait pour obtenir quelques bribes d’amour, à l’instar d’un tout petit enfant. Plus si affinités ! Tous deux sont pris dans la toile d’un rêve qui les dépasse. Tous deux sont pris dans des événements cruels dont ils sont les victimes. Tous deux saisis de désirs égoïstes, dominateurs et excessifs. On finit par envisager que Mère et fils sont finalement génétiquement identiques dans leur besoin de manipulation. C’est d’ailleurs ainsi que l’un et l’autre ont réussi à survivre. C’est ainsi également que le rêve se froisse et que le miroir étincelant se brouille et s’obscurcit. Les deux comédiens jouent leur vie sur le fil, avec sensibilité et maîtrise extrême, tout-à-fait conscient de l’éclat de leur propre jeu et du jeu de l’autre.

Et le jeu des acteurs fait tout, car la simple lecture des textes, s’avère … poussiéreuse ? Tandis que la mise en scène ? Géniale ! Signée Bruno Emsens. Les deux acteurs ont donc mis au point un ballet sans faille, sans cesse renouvelé et inventé. C’est tout juste si on n’imaginerait pas ces lettres chantées, comme à l’opéra, tant l’intensité des sentiments et des couleurs est omniprésente. Le jeu corporel est captivant, les regards et les gestes charmeurs ou ravageurs, palpitants. Body language speaks millions… Les deux protagonistes, rient, pleurent, mordent, et se câlinent comme des chats sauvages. Ils sont beaux, magnifiques d’énergie et bouleversants de vérité au milieu du champ maléfique, représenté par les secrets bien gardés de la grand-mère (Céline Péret) , où peu à peu on est contraint de défricher leurs mensonges.

Dominique Hélène Lemaire

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